Pour commencer : tu peux te présenter en deux phrases ? Qui tu es, ce que tu fais, et sur quoi tu travailles en ce moment ?

Je suis Simon Dubreuil, responsable du sponsoring Esport depuis 10 ans ainsi que de l'Influence gaming dans les équipes de la Direction de la Communication Commerciale d'Orange France. Dans ce cadre, je mets en œuvre une stratégie qui consiste à nous associer au club esport majeur qu'est Karmine Corp, au tournoi majeur qu'est la LFL et aux créateurs de contenu dont Inoxtag. J'ai aussi la responsabilité de Rush Esport qui est notre plateforme social media sur X, Tik Tok et Instagram.

Que ce soit en ligne ou dans la vraie vie, c’est quoi pour toi une bonne campagne d’influence ? Celle qui laisse une vraie trace.

C'est une recette très subtile pour laquelle il est difficile de réunir tous les ingrédients, surtout pour de l'organique, et le timing est crucial. A mon avis il faut de la sincérité et de l'authenticité car ce sont les bases du succès des créateurs de contenu, ce qui les différencie des audiences qui émergent des médias historiques. L'humour peut aussi être un ingrédient. Il faut se rappeler à qui on s'adresse et que l'on est pas forcément la cible, ne pas partir uniquement de ce que l'on veut dire mais de ce qui a de l'intérêt pour la cible. Il faut donc que le client, la marque, la chaîne de commandement soit capable de s'oublier un petit peu, de se mettre de côté.

Tu bosses dans un environnement où l’influence est souvent cross-canal. Qu’est-ce que tu penses des activations “terrain” ? (events, IRL, expériences immersives...)

Le GP Explorer est un exemple de ce qui est faisable aujourd'hui sur ce terrain, et c'est très impressionnant. Nous le faisons aussi avec Karmine Corp lors de leurs événements et c'est un terrain d'expérimentation qui n'a pas fini d'évoluer. Il faut toutefois garder un oeil sur le ratio budget / KPI et nous sommes souvent conduits à faire des choix. Quoi qu'il en soit ces activations terrain sont toujours hybrides car les événements sont streamés et il faut toujours les penser sur les deux volets, IRL et online.

Tu sens quoi comme gros shift dans ta manière de penser l’influence ces 5 dernières années ?

Depuis l'émergence des médias, les personnalités deviennent influentes en développant une audience qu'ils parviennent à monétiser. C'est vrai pour un acteur, un musicien, un présentateur TV, pour un sportif par extension.

Les "influenceurs" (je n'aime pas trop ce terme) ne sont que la continuité de ce phénomène et sont portés par une nouvelle technologie qui aplanit la chaîne de valeur, ce ne sont plus les chaînes de TV, les maisons de disques, les producteurs qui décident seuls des profils qui développeront une audience.

Aujourd'hui les audiences des créateurs de contenus et la fréquentation de leurs événements en public en font un phénomène mainstream. C'est une nouvelle forme de divertissement. Une campagne média ou un événement comme la Paris Games Week ne s'envisagent plus de la même façon qu'il y a quelques années, et les annonceurs ont de nouveaux supports puissants pour toucher le public. Une marque comme AirUp par exemple atteint une belle notoriété chez les jeunes par des moyens nouveaux et en un temps record. ça c'est nouveau.

J'ai adoré travailler avec Inoxtag sur notre communication sur la modération numérique la semaine avant la sortie de Kaizen. Orange sensibilise sur le temps d'écran dans le cadre de notre raison d'être car nous avons la responsabilité de porter ce discours du bon usage des écrans. Je connaissais Inoxtag depuis un an ou deux et nous cherchions le bon moment pour travailler ensemble. Le bon moment est venu lorsqu'il m'a lui-même parlé de ses expériences de déconnexion lors de ses entraînements en montagne pour préparer l'ascension de l'Everest, et de son envie de partager ce message à sa communauté. Nous étions donc dans une authenticité et une sincérité parfaites, ainsi qu'un excellent timing puisque sa prise de parole proposait les seules images de Kaizen disponibles entre l'annonce et la diffusion du documentaire.

Inoxtag a écrit lui-même le texte du message sur la déconnexion, choisi et monté les images, et l'a porté sur ses réseaux sociaux pour des résultats organiques impressionnants. Voir un opérateur télécom / FAI communiquer avec un YouTuber sur la modération numérique n'a pas manqué de surprendre mais c'est justement la pertinence du sujet qui valide le point. Nous sommes les mieux placés pour en parler. C'était un projet très simple, en direct entre lui et nous, et un de nos plus grands succès.

Tu préfères activer des créateurs stars, des micro-influenceurs ou des experts très ciblés ? Et pourquoi ?

Je pense qu'il faut faire les deux si l'on peut s'en donner les moyens. C'est aussi une question de budgets, nous sommes une marque avec de nombreuses offres à promouvoir, nous ne pouvons pas toujours activer les plus gros leviers, parfois il vaut mieux panacher les actions. Chaque créateur a sa façon de travailler, parfois (souvent) il passe par des intermédiaires, ce que je peux comprendre, mais ça peut-être une source d'incompréhension, d'approximation, de malentendu, ou tout simplement réduire ce qu'il peut proposer aux annonceurs à des dispositifs standardisés, et dégrader le potentiel de l'association. Il faut donc s'adapter à ce terrain.